Le RGPD a de lourdes conséquences pour le secteur de l’assurance. Le milieu de l’assurance traite directement les données personnelles, parfois même sensibles, de tout souscripteur.
Afin de comprendre les enjeux du RGPD en matière d’assurance, il convient de rĂ©pondre Ă plusieurs questions.Â
Quels sont les acteurs ? En quoi le domaine de l’assurance est spécifique pour le traitement des données ? Quelles sont les priorités pour se mettre à jour ?
RGPD et assurance : le champ d’application
La particularitĂ© du traitement des donnĂ©es personnelles par les assurancesÂ
Selon le RGPD, une donnée personnelle est une information se rapportant à une personne physique identifiée ou identifiable de façon directe ou indirecte (article 4 RGPD). Or, beaucoup d’organismes, assureurs y compris, ont accès à un grand nombre de renseignements (coordonnées, âge, numéro de sécurité sociale, identifiant, etc.).
En matière d’assurance, la spécificité réside dans l’analyse poussée des différentes données de l’assuré : situation financière, santé, patrimoine, travail, etc. Cela permet un profilage pour prédire des comportements et établir une grille des risques.
Bien évidemment, ce profilage nécessite l’application d’une protection particulière prévue par le RGPD car il comporte un risque évident concernant les libertés des personnes visées.
Pour rappel, le profilage est un type de traitement de donnĂ©es personnelles automatisĂ©, c’est-Ă -dire effectuĂ© par un algorithme, pour Ă©valuer certains aspects personnels relatifs Ă une personne en vue de prĂ©dire un comportement (article 4 RGPD). Ce type de traitement est rĂ©glementĂ© par l’article 22 RGPD.Â
Focus sur les données de santé
En fonction des services proposĂ©s par les assureurs, ces derniers ont inĂ©vitablement accès Ă des donnĂ©es de santĂ© : complĂ©mentaire santĂ©, prĂ©voyance, assurance vie etc.Â
Il s’agit de données dites “sensibles” dont la collecte et l’utilisation ne sont autorisées qu’à certaines conditions, notamment :
- Lorsque la personne concernĂ©e a librement donnĂ© son consentement,Â
- Lorsque le traitement est nécessaire à l’exécution de contrat dans le champ de la protection sociale.
C’est sur le fondement de cette deuxième exception que les assureurs sont en droit de collecter et utiliser des donnĂ©es de santĂ©. En effet, les contrats de complĂ©mentaires santĂ©, prĂ©voyance, assurance vie ou encore retraite correspondent Ă des contrats relevant de la protection sociale.Â
Responsable de traitement et sous-traitant : les acteurs de l’assurance
Le responsable de traitement est la personne morale qui définit les moyens et les finalités de traitement (article 4 RGPD). Dans notre cas, il s’agit de comme le courtier ou la compagnie d’assurance.
Le sous-traitant quant à lui agit pour le compte du responsable de traitement et sur les instructions du responsable de traitement (article 4 RGPD). Sont concernés les mandataires de la compagnie d’assurance, ses sous-traitants et tous les outils informatiques utilisés par la compagnie d’assurance.
Impact du RGPD dans l'assurance
Au regard des informations qu’ils possèdent, les acteurs du domaine de l’assurance ont tout intérêt à renforcer les obligations dictées par le RGPD
La sécurité des données et le domaine des assurances
Les compagnies d’assurances doivent s’assurer que les données qui leur sont confiées ne peuvent pas faire l’objet de vol, d’intrusion bien de modification par des tiers.
Pour assurer la protection de ces donnĂ©es, plusieurs mesures de sĂ©curitĂ© peuvent ĂŞtre mises en Ĺ“uvre : chiffrement des archives numĂ©riques, utilisation de clĂ©s cryptographiques, politique de mot de passe conforme aux recommandations de la CNIL, etc. La cybersĂ©curitĂ© est donc l’une des composantes pour bĂ©nĂ©ficier d'un haut niveau de sĂ©curisation.Â
Par ailleurs, en cas de fuite de données, il est indispensable de prévoir un protocole afin d’une part, de prévenir la CNIL et d’autre part, d’avertir les intéressés, étant entendu que tous ces événements sont à consigner.
Les droits des assurĂ©sÂ
Comme toute entreprise soumise au RGPD, les droits des personnes sont incontournables. Au regard de l’importance des données en jeu, la lisibilité de l’information est un réel enjeu.
Information renforcĂ©eÂ
Informer les assurĂ©s signifie qu’il faut effectuer un rĂ©el effort pour rendre l’information accessible et comprĂ©hensible. La CNIL recommande une approche Ă deux niveaux :Â
- les informations essentielles classiques : les types de données récoltées, l’identité et les coordonnées du DPO, les finalités du traitement, l’existence des droits, etc.
- ‍les informations complémentaires : la durée de conservation des données, les sous-traitants UE ou hors UE, l’existence ou non de profilage, etc.
Exercice des droits
Les assureurs doivent porter une attention particulière aux exercices des droits des personnes concernées par ces données. À la moindre demande, le responsable de traitement doit répondre le plus rapidement possible et au plus tard, dans le délai d’un mois. Concernant les données de santé, le délai est de 8 jours !
Pour rappel, voici ceux que la personne concernĂ©e peut exercer :Â
- le droit d’accès permet Ă un utilisateur de savoir oĂą en est le traitement de ses donnĂ©es ;Â
- le droit de rectification permet la modification et la correction des données personnelles ;
- le droit d’opposition permet de s’opposer à l’utilisation de ses données pour un objectif précis ;
- le droit à l’effacement permet d’obtenir l’effacement de ses données ;
- le droit Ă la limitation permet d’arrĂŞter temporairement l’utilisation des donnĂ©es ;Â
- le droit à la portabilité permet à la personne de récupérer une partie de ses données dans un format lisible pour son usage personnel ou pour les transmettre à un autre organisme d’assurance par exemple (copie des données) ;
- le droit à l’intervention humaine face à un profilage.
La durée de conservation des données en matière d’assurance
L’éternité n’existe pas en matière de conservation des données. On se réfère généralement à la durée pour la constatation, la défense ou l’exercice d’un droit en justice. Par conséquent, on se réfère souvent au délai de prescription en justice, qui hors spécificité, est égale à 5 ans. Le délai de conservation des données peut alors s’indexer sur ce délai de 5 ans à compter de la collecte ou du dernier contact avec le prospect.
De plus, le Code des assurances prĂ©voit des dĂ©lais de prescription spĂ©cifiques pour certains contrats comme l’assurance vie qui bĂ©nĂ©ficie d’un dĂ©lai de 30 ans Ă partir du dĂ©cès de l’assurĂ© pour les actions du bĂ©nĂ©ficiaire.Â
Mise en place du RGPD dans le secteur de l’assurance
La mise en conformitĂ© est un vaste chantier en perpĂ©tuel mouvement. Mais, au regard des spĂ©cificitĂ©s de ce domaine, nous vous conseillons de travailler sur les 5 prioritĂ©s suivantes :Â
- La sécurité des données qui vous sont confiées. Les risques cyber existent : il convient de choisir une architecture informatique solide et de vous doter d’un logiciel qui traque les intrusions ;
- La désignation d’un DPO est fortement recommandée (voire obligatoire). Son rôle de chef d’orchestre est essentiel : il aura une vue intégrale sur les données gérées par l’ensemble des services ;
- La tenue d'un registre qui Ă©numère le type de donnĂ©es collectĂ©es, l'utilisation qui en est faite, les bases lĂ©gales, l'objectif de leur utilisation etc.. Â
- L’exercice des droits : Il est nécessaire de prévoir un protocole spécifique pour répondre le plus rapidement possible au demandeur et procéder à l’effacement des données en interne si tel est l’objet de la demande ;
- Le choix d’un outil digital : suivre les informations à la main est chronophage et source d’erreurs. Il existe des logiciels tels que Leto qui automatise les nombreuses obligations imposées par le RGPD.